Porcs. Bien se positionner pour mieux saisir les opportunités de commercialisation
Les difficultés rencontrées sur le marché ont été évoquées lors de la traditionnelle Journée porcine organisée chaque année par Grangeneuve. Suisseporcs prépare une proposition pour résoudre ce problème.
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29 janvier 2024 à 10:52
Le 10 janvier 2024, Grangeneuve avait donné rendez-vous aux détenteurs de porcs fribourgeois pour sa Journée porcine. Si l’événement a dû être annulé en allemand, faute d’inscriptions suffisantes, la version francophone a réuni près de cinquante producteurs, dont certains provenant d’autres cantons.
Responsable des ventes de viande fraîche et membre de la direction de l’entreprise Bigler, Christian Santschi a présenté les défis auxquels la commercialisation de viande de porc doit faire face aujourd’hui en Suisse. Bigler SA, qui achète hebdomadairement 3000 porcs gras ainsi que 30 à 40 truies de réforme, réalise la moitié de son chiffre d’affaires avec des produits contenant de la viande de porc. "Nous fabriquons jusqu’à 2000 produits différents", a indiqué Christian Santschi. "Une gamme aussi large représente un challenge logistique important."
Consommation en baisse
Alors qu’en 2010, chaque Suisse mangeait encore, en moyenne, 24,6 kg de viande de porc, cette consommation annuelle stagne aujourd’hui autour de 20 kilos. Les tendances alimentaires actuelles ne sont malheureusement pas favorables à cette viande. Dans la multitude des régimes spécifiques qui fleurissent, très peu encourage la consommation de viande de porc. "C’est souvent injustifié, mais c’est un fait", a commenté Christian Santschi, qui a aussi relevé le fait que la production porcine est aussi pointée de doigt pour son empreinte écologique. "Je laisse aux spécialistes le soin de définir si le fait de se nourrir d’avocats produits à des milliers de kilomètres d’ici est vraiment plus favorable à l’environnement que de manger de la viande de porc", a-t-il lancé, dubitatif.
Une autre cause de la baisse de la consommation vient de l’évolution démographique de notre société. "De plus en plus de personnes refusent de manger du porc pour des raisons de religion", a relevé Christian Santschi. "Pour se faciliter la vie, les cuisiniers actifs dans la restauration collective telle que les crèches, les écoles, les entreprises et même l’armée, renoncent de plus en plus à mettre du porc dans leurs menus. C’est regrettable."
Mieux communiquer
Malgré cette tendance négative pour le secteur porcin, Christian Santschi est convaincu qu’il y a des opportunités à saisir sur le marché. Le porc se distingue, par exemple, par son efficience alimentaire très élevée. Il n’y a pas que la viande qui est valorisée: les abats, la graisse, le cuir et les os sont aussi utilisés pour produire des colles, des lubrifiants, des isolations ou des produits pharmaceutiques. "Il n’y a pas de gaspillage avec le porc!", a relevé le cadre de Bigler.
"Nous devons nous positionner et mieux communiquer. Aujourd’hui, on parle aux gens avec des images, en racontant des histoires, mais sans mensonge, incarnées par les producteurs. C’est la réalité et c’est là qu’on doit aller", a-t-il poursuivi. "En Suisse, la production porcine n’a rien à cacher!"
Suisseporcs cherche une solution
Depuis maintenant 3 ans, le prix moyen du porc n’a pas dépassé les 4 fr./kg PM. Selon Suisseporcs, un prix de 4,40 fr./kg PM est nécessaire pour couvrir les frais, amortir les installations, rémunérer le capital investit et rémunérer le travail du producteur à hauteur de 28 fr./h. "Le prix actuel ne couvre pas les coûts. Ce n’est donc pas durable", a commenté Stefan Müller, directeur de Suisseporcs.
Or, le prix est directement lié au niveau de production indigène. Le taux d’autoapprovisionnement s’est élevé à 99,6%, bien au-dessus de la cible des 92% qui permet d’obtenir des prix rémunérateurs. "Une trop forte production nous fait perdre beaucoup d’argent", a insisté Stefan Müller. "Une diminution de 50 ct/kg PM, c’est 100 millions de francs de moins pour les producteurs!"
Suisseporcs envisage le futur avec 4 scénarios possibles, du statu quo à une solution de branche. La faîtière des producteurs porcins présentera ses différents modèles lors d’une séance d’information qui se tiendra le 8 février prochain à Grangeneuve.
Actualités des maladies porcines
Collaborateur du Service de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires du Canton de Fribourg (SAAV), Alexandre Deflandre a expliqué comment les autorités entendent réagir en cas d’apparition d’un foyer de peste porcine africaine (PPA). "Nous savons que cette épizootie arrivera en Suisse. Nous ignorons seulement le moment et l’endroit où elle frappera", a-t-il prévenu. "Nous nous préparons pour en minimiser les conséquences."
Le vétérinaire officiel a également évoqué le développement d’un vaccin contre la PPA par l’Institut de virologie et d’immunologie (IVI), à Mittelhäusern (BE). "Ce vaccin doit encore être perfectionné", a précisé Alexandre Deflandre. "Mais il est hautement prometteur!"
Un cas d’APP
Alexandre Deflandre a aussi expliqué comment le Canton de Fribourg a réagi fin février 2023 lors de la découverte d’un foyer d’une autre épizootie à combattre: l’actinobacillose du porc (APP). Comme souvent, cette maladie a d’abord été détectée à l’abattoir, avec la découverte de poumons présentant des lésions sur des porcs en provenance d’une exploitation d’engraissement. "L’exploitation a été placée sous séquestre. C’est-à-dire que les porcs ne pouvaient en sortir que pour aller à l’abattoir et aucun nouveau porcelet n’a pu entrer dans cette porcherie", a expliqué Alexandre Deflandre. "Nous avons aussi ordonné, en concertation avec le Service sanitaire porcin (SSP), un assainissement de cette exploitation." Une fois l’ensemble des box vidés, la porcherie a été entièrement lavée et désinfectée.
Dans ce cas précis, le séquestre a pu être levé à mi-mai. "Cela peut prendre plus ou moins de temps", a souligné Alexandre Deflandre. "En moyenne, on compte 3 à 5 mois." Le vide sanitaire qui découle d’un tel séquestre peut avoir des conséquences financières importantes, en particulier pour les exploitations d’élevage à cause du retard de production que cette mesure induit. "Cette perte n’est pas couverte par l’assurance épizootie obligatoire", a relevé Jean-Luc Charbon, vétérinaire du SSP. "Pour les éleveurs, il me semble intéressant de souscrire à l’assurance de Suisse Grêle."
VG
Nouvelle certification pour la biosécurité
Au début de cette année, Suisag a lancé un projet, nommé BioSec, qui vise à développer une nouvelle certification pour les exploitations porcines suisses. Après s’être annoncés auprès de Suisag, les exploitants intéressés doivent procéder à une autoévaluation des risques sanitaires de leurs propres porcheries, notamment en ce qui concerne le risque lié à la peste porcine.
Ensuite, un vétérinaire du Service sanitaire porcin (SSP) se déplace sur l’exploitation pour évaluer lui aussi les risques. "En Suisse romande, ce sera Jean-Luc Charbon qui procédera à ces visites", a précisé Matteo Aeppli, directeur de Suisag. "Après cette visite, soit la certification est délivrée, soit des mesures supplémentaires sont exigées".
Deux niveaux
Le certificat repose sur deux niveaux d’exigences. Pour atteindre le premier, une série de critères doit être respectée par les exploitations candidates. Le parcours extérieur, pour les porcheries qui en disposent, doit être à l’abri des sangliers. Le bâtiment doit être pourvu d’un sas d’hygiène tel que ceux construits pour les poulaillers. L’accès aux porcs ne doit être possible qu’en passant par ce sas. Un lavabo, où l’on peut se laver les mains, doit en outre être disponible près du sas. Enfin, une feuille de contrôle du risque de peste porcine africaine doit être remplie.
Suisag a mis au point un système à points en pondérant les critères selon leur importance. Chaque critère est jugé comme satisfait ou non satisfait. Lors de la visite d’évaluation, il faut obtenir au moins 33% des points pour atteindre le premier niveau et 66% pour remplir les exigences du second niveau.
Formation et coût
La première année, les exploitants certifiés doivent suivre un cours d’une demi-journée où ils seront sensibilisés aux bases de la biosécurité. À partir de la deuxième année, Suisag organisera une visite annuelle de l’exploitation afin d’évaluer la situation et de conseiller les exploitants. Si nécessaire, des mesures complémentaires sont définies en commun. La formation continue des détenteurs de porcs sera assurée en ligne.
Pour obtenir le certificat BioSec, il faudra compter 550 francs la première année, puis 450 fr./an pour les années suivantes. Sont inclus dans l’offre de Suisag non seulement la certification, mais aussi un cours de formation continue de 2 à 3 heures et une visite annuelle de l’exploitation par un vétérinaire de Suisag. De plus, la certification donne droit à un rabais de 10% sur les primes de l’assurance épidémie de Suisse Grêle et sur la création de clôtures de protection par Swissclôture. "Cela en vaut clairement la peine!", a commenté Matteo Aeppli.
Argument pour la communication
Le directeur de Suisag a relevé les avantages de connaître et de respecter les principales mesures de biosécurité. "Le fait d’obtenir des conseils spécifiques du SSP contribue à améliorer la protection de ses animaux, mais aussi à réduire le potentiel de dommages en cas d’épizootie", a-t-il insisté. "Cela permet aussi à l’exploitant de montrer à ses partenaires commerciaux, aux autorités et au public, les efforts qu’il consent."
VG